La maintenance des installations d’assainissement, un défi technique quotidien
‘Je suis né au Maroc où j’ai poursuivi mes études jusqu’au baccalauréat. Malgré de faibles moyens, j’ai suivi ensuite des études en France, d’abord un DEUG de Physique-Chimie, puis une formation professionnelle de technicien de maintenance en électrotechnique et automatisme. Grâce à ces deux parcours, je me suis doté d’un bagage scientifique et de compétences en électricité et électromécanique. J’ai travaillé dans un premier temps dans un bureau d’études. En 1989, au bout de quelques années dans le même poste, j’ai voulu changer d’entreprise et j’ai rencontré des difficultés pour retrouver du travail. Dans le cadre de ma recherche, je suis tombé par hasard sur une annonce concernant un poste de technicien de maintenance. Il s’agissait d’assurer la maintenance et l’entretien d’une station de pompage d’eau potable. J’avais les connaissances techniques mais aucune connaissance en eau, si bien que suite à l’entretien, je n’ai pas été retenu. Toutefois, cela m’a donné envie d’en savoir plus sur le domaine de l’eau qui m’était inconnu. J’ai découvert la formation DEUST Métiers de l’eau par une annonce presse. J’ai exposé mon besoin d’une formation complémentaire et j’ai été accepté. La formation s’est bien passée. J’ai appris tout ce qui concernait l’assainissement (les pompes, les turbines, les aérateurs, les suppresseurs…) et suffisamment d’électricité pour comprendre une armoire électrique. En fin d’année, j’ai eu de la chance au moment de chercher un stage. Un des intervenants était le dirigeant de l’entreprise France Epuration. À la fin du cours, je lui ai demandé s’il cherchait un stagiaire, car c’était une personne expérimentée, passionnée par son métier. Il m’a pris en stage puis m’a embauché en tant que responsable maintenance et j’y suis resté 10 ans.
Concrètement, mon activité a consisté à assurer la maintenance sur des installations d’assainissement autonome, sur des stations d’épuration, des pompes de relevage… Au bout de 10 ans, l’entreprise a été vendue à des industriels qui ne connaissaient pas les métiers de l’eau et je me suis mal entendu avec ce nouvel employeur. Parallèlement, je voulais progresser vers une activité d’indépendant. Un jour, mon employeur m’a dit : ‘Monsieur Boukhir, vous êtes excellent en maintenance, mais je sens que vous voulez diriger votre propre entreprise.’ Cela a été le facteur déclenchant. J’ai réfléchi pendant quelques mois, puis j’ai démissionné et j’ai créé ma propre entreprise.
Aujourd’hui, je suis gérant de ma société, qui s’appelle Ciels. Je réalise tout de A à Z, depuis la gestion, le démarchage commercial, jusqu’aux prestations. Je suis spécialisé dans la maintenance et l’entretien de stations d’épuration avec une spécialité sur les stations autoroutières allant de 5 à 1000 équivalents habitants. Mes clients sont variés et situés dans toute la France.
Mon objectif : faire en sorte que les installations fonctionnent au mieux et c’est un défi permanent !
Pour chaque situation, il faut trouver rapidement la réponse : démonter, régler, remplacer ou dépanner une pompe, dépanner une armoire électrique, remplacer un tuyau de PVC, réaliser des prélèvements pour les séparateurs d’hydrocarbures, vérifier le niveau de rejets… Ces activités exigent une connaissance très polyvalente et doivent être menées dans le respect de la réglementation environnementale et sécurité, car elles concernent des sites sensibles. Je me déplace 4 ou 5 jours par mois et entre chaque déplacement, je n’interviens pas. Il n’est pas question d’avoir une panne majeure entre deux périodes d’interventions. Il faut donc être efficace. De manière plus exceptionnelle, j’interviens pour des collectivités dans le cadre de travaux de curage des réseaux d’écoulement.
Je suis à mon compte depuis 10 ans. L’entreprise fonctionne bien, avec des nouveaux clients chaque année, sans que j’aie besoin d’assurer réellement une démarche commerciale. C’est grâce à la qualité du service que je réussis à me développer. J’ai eu des collaborateurs à certaines périodes mais j’ai du mal à trouver des salariés qui répondent aux exigences de mes clients, même si aujourd’hui je suis saturé en termes de charge de travail. À moyen terme, j’envisage ainsi de pouvoir recruter un collaborateur compétent, qui sera chargé du suivi régulier de maintenance. Je suis toujours passionné par ce métier bien qu’il soit peu et mal reconnu.
Nous ne sommes pas nombreux à le maîtriser, ce qui rend difficile le recrutement de collaborateurs. Pourtant c’est un domaine qui a besoin de techniciens. Mes concurrents ont beaucoup recours aux ingénieurs. Cela ne me semble pas pertinent : les ingénieurs réalisent les plans à partir de leur bureau, mais commettent des erreurs basiques par manque de connaissance de terrain. Par exemple, j’ai vu des erreurs de calibrage sur des chenaux d’écoulements qui n’auraient pas été faites par un technicien…
Dans le cadre de mon activité, je rencontre de nombreuses difficultés, en particulier dans les situations de dépannage. Par exemple, après exploration, j’ai retrouvé un bouchon de réservoir d’essence dans un coude de canalisation de PVC. Moralité de la chose : il ne faut jamais installer une pompe d’aspiration dont le diamètre est supérieur au diamètre de la canalisation d’eau ! Sur un autre site, on avait un problème sur une pompe de relevage qui fonctionnait mal. On a fini par comprendre que l’entreprise de génie civil n’avait pas respecté la pente, et que cela créait des poches d’air entre le haut et le bas. Parfois, il y a aussi des situations d’urgence à gérer. Un dimanche, je reçois le coup de fil d’un client dont la station-service se trouve à côté de Lille. Les deux pompes du poste de relevage sont tombées en panne alors que la station connait un fort trafic. Il était 11h du matin, je suis parti immédiatement de mon domicile de la banlieue lyonnaise et à 8h du soir tout était de nouveau en service !
C’est la volonté et l’expérience qui m’ont permis de dépanner aussi vite ce client, le fruit d’un travail maîtrisé depuis 20 ans !’